Annie Mignard écrivain

A coups de mots discrets, de petites phrases parfois douces, parfois assassines, Annie Mignard raconte des histoires, Sept histoires d’amour (Ramsay/”Mots”). Des histoires simples a-t-on envie de dire, pour parodier au pluriel le titre d’un film célèbre en son temps.

Dans un village, un couple adultère, des paysans, se rejoint dans l’apothéose de leurs deux corps confondus et provoque un scandale. Ailleurs, un peintre venu en villégiature se prend de passion - qui lui est rendue - pour l’épouse d’un boucher. Plus loin, une vieille femme ne survivra pas à son compagnon défunt, alors que sa fille “s’occupe de tout” et que, déjà, les lettres de condoléances parviennent à la veuve. C’est toujours le même sentiment - l’amour - et ce n’est jamais pareil. Marie-Jeanne de Rambérieu s’entiche jusqu’à l’obsession d’un violoniste, assiste à chacun de ses

concerts, le dévore du regard, et s’éloigne un jour, comme ça. Charles, anglais, homosexuel, épris d’un Libanais mythique qui le gruge, à l’évidence, chasse les garçons et, fou d’orgueil, craint la vieillesse, avec la peur de ne plus plaire; bien entendu, les jeunes gens destinés à ses plaisirs reçoivent de lui le salaire de leur complaisance. Camille, éternelle insatisfaite, volontaire pour de médiocres “partouzes”, se fixe en parasite sur un homme marié, le poursuit de ville en ville, tenant l’enfant de leur union à la main; et le géniteur a une seule idée: qu’elle le laisse en paix...

Les personnages d’Annie Mignard sont comme des insectes pris dans une toile d’araignée, mais ils la tissent eux-mêmes. Ils ne peuvent ni ne veulent échapper à leur destin, font des prodiges pour parvenir à leur fin, et décrochent, brusquement. Leur conduite défie les règles du bon sens, dégénère. Leur personnalité se craquèle, déstabilisée par une force plus grande que leur intelligence, leur éducation, les règles qu’ils s’imposent. Ces désordres de l’amour, Annie Mignard les observe et les rend avec beaucoup de finesse.