Annie Mignard  écrivain

dossier de presse de “7 Histoires d’amour”



LE MONDE - Jean-Noël Pancrazi


ANNIE MIGNARD ET LES ATTENTES DU DÉSIR



  Peut-être ne connaît-on quelqu’un que par le biais des histoires d’amour qu’il a vécues: elles seules peuvent, pour Annie Mignard, nous révéler les parts d’ombre de son existence, en dévoiler l’énigme.


  Traquant - dans ces 7 Histoires d’amour (Ramsay), qui sont autant de versions de la passion - le détail “minuscule, inconscient” par lequel deux êtres s’enchaînent, Annie Mignard excelle à peindre, en de longues phrases chavirées, l’étreinte d’amants clandestins qui, stupéfaits de l’intensité de leur propre désir, essayent de “tout attraper” l’un de l’autre.


  Puis, comme si l’ombre des années s’étendait sur le recueil, le désir se voile peu à peu, s’intériorise: Marie-Jeanne de Rambérieu aime - d’un de ces sentiments qui creusent “un trou dans l’âme” - le violoniste Andréas Rudnik sans jamais l’approcher. Dissimulée dans la nuit des salles de concert, elle se contente de l’admirer et, à



force d’abnégation, se vide de sa propre vie, épuisée par la volupté triste d’une attente sans fin.


  Annie Mignard croit dans le rituel de l’amour et la vertu de l’ascèse du coeur à nu. Faute de ne pouvoir retrouver “une bonté primitive” à laquelle elle a été, un jour, arrachée, Camille, entraînée par sa panique de manquer au plaisir et son obsession de l’échange, n’est plus qu’une femme en transit dans sa propre vie, une adepte de la déception.


  Sans doute n’a-t-on de chances de demeurer intact qu’en ne reniant pas tout à fait ses premières espérances: celles de Lisa qui, lovée dans l’arrondi du balcon dominant l’ennui ensoleillé d’un boulevard de Marseille, rêve à une rencontre idéale. Mais, éblouie de chimères, Lisa ne sait plus si elle veut aimer ou mourir tant l’appel de l’absolu se confond avec l’attrait de la chute, la tentation de la perte alors que naît en elle la conscience à la fois euphorique et blessée que “pour une femme, aimer, ce n’est pas jouir d’un bonheur, mais en faire jouir les autres”.